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Réellement différente.

Illustration: artischock.net

La Banque Alternative Suisse (BAS) éprouve de fortes sympathies à l’égard de l’objectif fondamental de l’initiative Monnaie pleine. Elle considère qu’il est urgent de débattre de la régulation du système financier, mais doute que l’initiative puisse corriger les mécanismes qui mènent aux dérives. La BAS ne la soutient donc pas.

Débattre de la politique monétaire et financière est essentiel. Et les efforts du comité d’initiative pour porter ce débat sur la scène politique et dans la collectivité sont louables. La Banque Alternative Suisse (BAS) partage l’objectif de l’initiative: rendre le système financier plus stable. Depuis des décennies, la masse monétaire croît davantage que l’économie. De plus en plus d’argent finit dans la sphère financière plutôt que dans l’économie réelle. Cela forme des bulles, comme la bulle immobilière qui a éclaté aux Etats-Unis en 2007/2008 et causé l’une des plus graves crises financières mondiales.

Pas de création d'argent par les banques privées

Les initiant-e-s voient dans la création excessive d’argent par les banques l’une des causes majeures de cette crise. Elles et ils veulent donc endiguer la création de monnaie par des banques et confier cette responsabilité à la Banque nationale suisse (BNS). D’après les arguments de l’initiative, ce changement de système ne présenterait que des avantages pour la société: l’argent déposé sur les comptes de paiement serait sûr, puisqu’il proviendrait directement de la BNS, tout comme l’argent liquide. En outre, la BNS pourrait mieux contrôler la masse monétaire et répartir directement la monnaie qu’elle aura créée entre la Confédération, les cantons et les citoyen-ne-s. La BNS ferait des bénéfices qui pourraient revenir aux pouvoirs publics.

La création de monnaie en soi n'est pas le problème

Du point de vue de la BAS, la cause de la crise financière de 2008 ne tient pas à la création d’argent en elle-même, mais aux pratiques commerciales des banques impliquées. Orientées vers le profit à court terme, ces banques ont accordé des crédits avec des garanties insuffisantes et à des fins spéculatives. La transformation du système monétaire avec un monopole d’Etat pour la création d’argent, comme l’exige l’initiative, ne changerait rien à ce mécanisme. Certes, les dépôts à court terme de la clientèle sur les comptes de virement et les comptes courants des banques ne pourraient plus servir à octroyer des crédits; ils seraient mieux protégés qu’aujourd’hui en cas de faillite bancaire. Néanmoins, les banques disposeraient toujours d’assez d’autres sources de financement pour faire des affaires visant le profit à court terme, en prenant des risques et au mépris du développement durable. La nationalisation de la création de monnaie n’empêcherait pas de futures crises financières. En bref: le problème n’est pas la création d’argent, mais son utilisation incontrôlée.

La démarche proposée comporte beaucoup de rsques et suscite de faux espoirs

Le changement de système proposé par l’initiative concerne tout particulièrement la Banque nationale suisse. L’amalgame prévu entre politique fiscale et monétaire ferait perdre à la BNS son indépendance et, du même coup, sa crédibilité. Il ne faut pas sous-estimer les effets économiques qui pourraient en découler, qu’il s’agisse du cours du franc ou des flux de capitaux depuis et vers l’étranger. La Banque Alternative Suisse est en outre préoccupée par les attentes que suscite l’initiative Monnaie pleine auprès de la population, lorsqu’elle laisse entrevoir des « bénéfices conséquents provenant de la création d’argent » en faveur des pouvoirs publics. Ces bénéfices ne sont envisageables que si l’économie et, par conséquent, la masse monétaire nécessaire s’accroissent constamment. Que se passerait-il dans la situation inverse, qui contraindrait la BNS à réduire la masse monétaire, par exemple en raison d’une surchauffe de l’économie? Cela obligerait l’Etat à verser de l’argent à la BNS, notamment en augmentant les impôts.

L'alternative: Fixer un taux d'endettement maximum

Il existe des solutions qui comportent moins de risques et ont de meilleures chances, d’un point de vue pragmatique. La BAS soutient à cet égard un renforcement des prescriptions relatives au taux d’endettement maximum (Leverage Ratio ) des banques. La FINMA exige actuellement des banques d’importance systémique un taux d’au moins 5%. Il vaudrait mieux demander 8 à 15%, en fonction de l’importance du risque inhérent au modèle commercial d’une banque.

Orienter la régulatino vers le développement durable

La régulation bancaire actuelle vise la diminution à court terme des risques financiers. Elle néglige les aspects sociaux et écologiques, qui agissent à long terme sur la stabilité du système financier. Il est donc nécessaire de mener une discussion politique approfondie sur les objectifs de la régulation. Le législateur, de même que les autorités nationales et internationales de surveillance des banques sont en mesure de lier davantage la régulation du secteur financier avec un développement durable de l’économie et de la société.

Plus d'informations dans le dossier Monnaie pleine